Comment la girafe est tombée malade...

...et comment tous les animaux l'ont aidée.

Cette histoire s'est déroulée dans le zoo de Saint-Pétroz, la petite commune où a eu lieu le fameux festival des cochons, dont le concours de chant a été gagné, si vous vous souvenez bien, par notre amie Valérie la Marmotte.

Saint-Pétroz est une ville au sud de la France, ce qui implique qu'habituellement il fait très chaud la-bas. Grâce à cela le zoo municipal hébergeait sans problème les animaux Africains, habitués aux grandes chaleurs et sensibles au froid, comme les girafes ou les lions. Il était en revanche très difficile de créer les conditions acceptables pour les ours blancs et les pingouins, ce qui fait que petit à petit le zoo de Saint-Pétroz a utilisé ses contacts internationaux pour échanger presque tous ses animaux nordiques contre ceux des continents plus chauds. Ils ont seulement gardé une famille d'ours blancs qui commençaient à s'habituer à la météo méditerranéenne, plus trois pingouins, qui étaient hébergés dans une cage réfrigérée, protégée du soleil par le verre réfléchissant, comme sur les pare-brises des voitures modernes.

Au mois d'août, presque tous les employés du zoo ont posé quelques jours de congé pour profiter d'un long week-end. Tout le monde comptait sur quelqu'un d'autre pour rester travailler au zoo, et ainsi les deux seules personnes qui ne partaient pas, étaient le gardien du zoo, qui ne partait jamais en vacances, et un stagiaire de licence en biologie marine qui étudiait les phoques pour son projet de fin d'année.

Météo France annonçait du très beau temps  pour les trois jours à venir. Cela paraissait parfaitement normal pour le mois d'août et aucun des employés du zoo ne s'est inquiété sur le sort des animaux pendant leur absence. Chacun a juste laissé assez de nourriture aux animaux dont il ou elle était responsable et tout le monde est parti profiter de ces petites vacances, l'esprit tranquille.

Le problème, c'est que parfois (assez rarement quand même, ne soyons pas mauvaises langues ;-), Météo France se trompe dans ses prévisions. C'est ce qui est arrivé pendant les jours d'absence de tout le personnel du zoo: au lieu des 28°C annoncés, la température est tombée à 5°C le matin, avec à peine 10°C pendant la journée, sans parler de la pluie froide et le vent perçant qui accompagnaient tout ça! Un temps aussi exécrable à Saint-Pétroz arrive normalement une fois tous les 20 ans, et il a fallu que ce jour tombe pendant la période où les pauvres animaux étaient laissés sans surveillance. Tout le monde au zoo tremblait de froid, même les ours blancs dont la fourrure était mouillée jusqu'à la peau et ne les protégeait donc plus du tout.

Malgré tout, presque tous les animaux, même africains, avaient déjà vu un temps comparable, car l'hiver même à Saint-Pétroz il ne fait pas très beau et très chaud tous les jours. La seule qui vivait un froid pareil pour la première fois de sa vie était une petite girafe, née au mois de mai de la même année, qui n'avait jamais encore vu l'hiver. Cette girafe (son prénom était Béatrice, de la famille NDUMBA), de par son jeune age, était encore très sensible. Elle est donc tombée malade malgré tous les efforts de ses parents et amis girafes pour la protéger du froid et de la pluie. Elle était périodiquement secouée par des toux tellement fortes que l'on aurait dit que son cou très fin allait se casser en deux. De plus son nez était complètement bouché on avait l'impression d'entendre un petit canard lorsque Béatrice essayait de parler.

Les parents de Béatrice étaient affolés, car ils n'avaient jamais eu de grippe eux-mêmes et ils ne savaient donc pas comment la soigner...

Pendant ce temps Valérie la Marmotte, son copain Gautier le Castor et leur ami Vincent la Taupe étaient tellement désespérés par le mauvais temps qu'ils n'avaient même plus envie de jouer à leur jeux préféré - Le Scrabble. Il faut dire qu'ils n'avaient pas arrêté d'y jouer pendant près de 15 heures d'affilées, en grignotant des nachos au guacamole et en buvant du Schweppes. Ils avaient les yeux rouges de fatigue et les ventres ronds, remplis de nachos et de bulles du Schweppes. Ils ont décidé de sortir un peu pour se dégourdir les pattes. Chacun a mis un gros pull, pris un parapluie (pour les petits animaux comme eux une grande feuille de fougère suffit largement en tant que parapluie). Ils ont décidé d'aller voir le zoo de Saint-Pétroz, où ils avaient plein de connaissances, car Vincent la Taupe était très apprécié la-bas pour ses connaissances des différentes langues des animaux - de la langue des girafes à celle des paresseux - ce qui permettait aux animaux qui ne se comprendraient pas en temps normal de communiquer, faire des blagues, même de se draguer. Les trois amis connaissaient notamment la famille des girafes NDUMBA, arrivés à Saint-Pétroz il n'y a pas si longtemps, qui ne parlait pas bien encore le girafe Français.

En entrant au zoo Valérie, Gautier et Vincent ont été surpris par l'absence flagrante de tout être humain (normalement il y en avaient des foules, grouillant autour des cages et pavillons animaliers). Il régnait un silence presque total, car tous les animaux étaient déprimés par le mauvais temps, et n'avaient pas envie de jouer comme d'habitude. On n'entendait que le bruit de la pluie sur les feuilles des arbres et les flaques sur le sol, mais encore un autre bruit qui ressemblait à une toux d'une petite girafe. Puis Vincent a entendu du girafe Africain: "Ne t'inquiète pas chérie, l'ours m'a dit que cette maladie n'est pas très grave, que cela lui arrivait tout le temps quand il était encore dans les forêts de la Sibérie" - c'était le papa de Béatrice qui parlait à sa femme.

Les trois amis se sont précipités vers le pavillon des girafes et ont tout de suite compris ce qui se passait - la petite Béatrice avait attrapé froid et ses parents ne savaient quoi faire. Valérie, par l'intermédiaire de Vincent qui traduisait, a expliqué aux parents de la petite qu'il n'y avait pas grand chose à craindre de cette maladie, que c'était plus désagréable que dangereux, mais qu'il fallait quand même protéger Béatrice du froid avec une écharpe. Gautier, qui adorait les jeux et les concours divers, a tout de suite proposé d'organiser un championnat du zoo de tricot d'écharpe. Avant que quelqu'un ait le temps de dire quoi que ce soit, il a tout couru dans tout le zoo pour proposer le concours aux autres animaux. Les animaux ont trouvé ce concours un peu bizarre mais il fallait bien aider la petite girafe. De plus tout le monde s'ennuyait tellement que n'importe quelle animation était mieux que rien.

Après inscription les participants étaient:

Lorsque les inscriptions ont fermé, tous les participants ont commencé à s'équiper:

Pour les aiguilles tout le monde est allé chercher le Porc-épic. Heureusement, ce dernier en perdait beaucoup tout le temps et comme les employés du zoo étaient partis depuis deux jours, toutes ces aiguilles n'étaient pas ramassées. Seule Valérie la Marmotte a essayé d'aller chercher ses aiguilles de tricot à la maison mais pour l'égalité du concours tout le monde l'a convaincue d'utiliser ceux du Porc-épic, comme les autres. En revanche les oiseaux ont été officiellement autorisés à ne pas utiliser d'aiguilles (imaginez un oiseau tenir une aiguille, pis, tricoter avec!) mais faire avec leurs becs.

Pour la laine les animaux ont décidé de raser un peu les moutons du zoo. Pour cela Gautier a piqué une tondeuse sans fil chez le gardien, qui faisait, comme à son habitude, la sieste de l'après-midi. Malheureusement pour les moutons, le nombre de participants était élevé et le cou de la girafe long, alors tous les montons ont été rasés très court, et même le buffle a failli y passer. Heureusement pour lui il ne restait plus de piles dans la tondeuse...

Ensuite chacun des participants (ou groupes de participants) a pris les mesures du cou de Béatrice, dessiné les croquis de la future écharpe. Une fois tout le monde prêt, le signal de départ a été donné et tout le monde s'est précipité vers le tas de laine qui lui avait été attribué, attrapé ses aiguilles et commencé à tricoter. Tout le monde tricotait à toute vitesse, et les aiguilles faisaient tellement de bruit que cela a réveillé le gardien. Gautier, qui ne participait pas dans le concours (car il ne savait pas tricoter), s'est chargé d'attirer son attention pour qu'il ne découvre pas le concours. Il a attaché une ficelle à la tondeuse, l'a déposée sous la porte du gardien, puis s'est caché dans un buisson, en ayant frappé à la porte. Vous imaginez facilement la suite: à chaque fois que le gardien essayait d'attraper la tondeuse, Gautier tirait sur la ficelle et s'avançait encore un peu dans les buissons...

Pendant ce temps le concours continuait. Les tricoteurs continuaient de plus belle. On voyait déjà apparaître la forme d'écharpe chez la plupart des participants. Seul Vincent la taupe était encore dans les petits morceaux sans forme et personne ne n'aurait parié cher sur le fait que ce soit lui le gagnant du concours.

Vers minuit tout le monde avait terminé son écharpe, sauf Vincent, toujours en train de tricoter plein de petits bouts. Les animaux ont décidé de se coucher en couvrant Béatrice avec les écharpes déjà prêtes, et de reporter la décision du jury (composé bien sûr de Béatrice et ses parents, mais aussi de Gautier, la femme de l'ours, et les moutons) et d'annoncer le résultat du concours le lendemain matin. Au matin tout le monde s'est réveillé en pleine forme, y compris Béatrice qui avait déjà moins froid. Les animaux ont vu Vincent... et un magnifique pull au col roulé posé à côté de lui. Tout le monde a enfin compris ce que représentaient les petits bouts de tricot que faisait Vincent : les manches, le col, le dos, etc. Le pauvre avait tellement travaillé la nuit sur son pull que personne n'a réussi à le réveiller. En revanche le jury a donné le prix du meilleur tricoteur à Vincent, pour son originalité, sa détermination mais aussi la qualité de son travail - personne n'avait encore jamais vu de pull aussi épais et doux. La deuxième place a été attribué ex-aequo à tous les autres participants. Lorsque Vincent s'est enfin réveillé le soleil apparaissait à nouveau, les animaux faisaient la fête pour leurs deuxièmes places et Béatrice était presque guérie. Ainsi tout le monde est reparti chez lui heureux.

Il ne me reste plus qu'à vous faire imaginer l'étonnement des employés du zoo au retour de leur week-end prolongé: la jeune girafe en pull et avec cinq écharpes; les moutons rasés jusqu'à la peau; le buffle encore tremblant de peur et criant "non, ne me rasez pas! pitié!" (il criait en buffle, bien sûr, donc personne ne l'a compris car Vincent n'était pas là pour traduire); le gardien cherchant encore sa tondeuse dans les buissons; le pavillon du Porc-épic complètement nettoyé des aiguilles (qui ont été retrouvées chez les girafes); finalement les trous de taupe un peu partout dans les gazons (en partant Vincent n'a pas pu s'empêcher d'en faire quelques unes - on ne se refait pas ;-)

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